Des boîtiers imprimés en 3D pour explorer les profondeurs océaniques

L’enthousiasme pour l’exploration spatiale reste vif à travers le monde. Cependant, une autre frontière, souvent considérée comme impénétrable, demeure ici sur Terre. Bien que les océans recouvrent la majorité de notre planète, soit plus de 70 %, la National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA) rapporte que moins de 20 % des fonds marins ont été pleinement cartographiés. En comparaison, l’exploration marine est largement négligée et insuffisamment financée par rapport à la conquête de l’espace. Malgré ces obstacles, certains scientifiques continuent d’avancer et utilisent la technologie de l’impression 3D pour pousser plus loin leurs investigations.

Au sein du Undersea Robotics and Imaging Laboratory, situé au Bay Campus de l’Université de Rhode Island, le Dr Brennan Phillips et son équipe d’étudiants fabriquent des dispositifs destinés à explorer les profondeurs marines, parfois à plusieurs milliers de mètres sous l’eau. Ils utilisent notamment des imprimantes 3D stéréolithographiques (SLA) Form 3+ et Form 3L pour créer des caissons de caméra étanches et divers instruments de recherche.

Des pièces qui restent étanches sous pression

Pour explorer les profondeurs océaniques, il est crucial de développer des instruments non seulement imperméables, mais aussi résistants aux fortes pressions sous-marines. Monsieur Phillips et son équipe d’étudiants ont travaillé à l’élaboration d’un caisson imprimé en 3D, destiné à protéger une caméra de l’eau tout en résistant à la pression, tout cela en conservant la possibilité de le démonter aisément pour accéder aux données enregistrées. Après de nombreux essais, ils ont adopté un modèle cylindrique, fabriqué en deux parties grâce à l’imprimante Form 3+ utilisant de la Résine Claire. L’intérieur du caisson, qui abrite le circuit imprimé, est scellé avec de l’époxy, créant une suspension pour la lentille de la caméra. L’époxy est injecté à travers des orifices prévus dans la conception, solidifiant tout ce qui se trouve sous la lentille.

Le projet s’est articulé autour d’une question centrale : comment fabriquer la caméra la plus compacte et économique possible pour les abysses marins ? La réponse a été de tester de multiples designs grâce à l’impression 3D, ce qui a permis une grande liberté dans la forme des prototypes. Cette approche a également permis à M. Phillips de concevoir rapidement de nouveaux modèles, d’intégrer les composants électroniques nécessaires, d’ajuster les dimensions, puis de remplir les structures de résine époxy.

L’usage de l’impression 3D a rendu possible la multiplication des versions testées sans pour autant alourdir le coût des expérimentations, offrant une flexibilité de conception bien supérieure à celle des méthodes traditionnelles de fabrication.

Pour tester la résistance de leurs créations dans des conditions similaires à celles des fonds marins, le laboratoire emploie une cuve spéciale capable de simuler les hautes pressions des abysses. Une fois que M. Phillips et ses étudiants se sont accordés sur le modèle en deux parties, ils ont introduit les prototypes dans cette chambre à haute pression. En augmentant la pression à l’intérieur de la cuve, ils ont pu recréer les conditions extrêmes rencontrées dans les profondeurs océaniques. « C’était une aventure inédite pour nous, nous avons poussé nos tests bien au-delà de ce que nous avions expérimenté auparavant, atteignant des profondeurs équivalentes à plusieurs milliers de mètres sous la surface », raconte M. Phillips.

Pourquoi le SLA est la solution idéale pour les robots en eaux profondes

Lors de la sélection d’une imprimante 3D, le laboratoire dirigé par M. Phillips a privilégié la précision et la qualité des matériaux. Les pièces produites par stéréolithographie (SLA) sont denses et imperméables, contrairement à celles issues de l’impression 3D par dépôt de filament fondu (FDM), qui peuvent présenter une certaine porosité et, par conséquent, une tendance à fuir. Les surfaces lisses obtenues avec le SLA facilitent l’assemblage hermétique de pièces complexes, telles que les boîtiers cylindriques en deux segments, en évitant les fuites potentielles dues à des irrégularités de surface. La finesse et la haute définition des impressions permettent d’atteindre des tolérances très serrées et de reproduire des détails minutieux, y compris la possibilité d’intégrer des filetages directement dans le matériau, une technique utilisée par le laboratoire pour ses boîtiers et vis, renforçant ainsi l’étanchéité de l’ensemble.

M. Phillips souligne les limites de la FDM pour ce type d’application, notamment en termes de résistance sous pression et de précision nécessaire pour assurer l’étanchéité des joints. Il met en avant les performances supérieures des matériaux SLA, en termes de résistance et de propriétés mécaniques, comparées à celles des alternatives testées par le laboratoire.

La technologie Formlabs a permis au laboratoire de développer avec succès des boîtiers étanches adaptés aux profondeurs océaniques et de continuer à innover tant en laboratoire qu’en milieu marin. En janvier 2020, M. Phillips et son équipe ont démontré la faisabilité de l’impression 3D en mer, à bord de navires, en utilisant une Form 2 stabilisée, produisant des pièces de qualité comparable à celles imprimées à terre. Cette avancée s’inscrit dans l’objectif du laboratoire de rendre l’exploration sous-marine plus accessible et économique, en permettant la production locale d’équipements spécialisés.

Adopter la Form 3L

Quand Formlabs a introduit la Form 3L, M. Phillips et son équipe furent parmi les premiers à reconnaître son potentiel.

Grâce à sa grande capacité, cette imprimante a ouvert de nouvelles possibilités pour le laboratoire, leur permettant d’élargir leurs horizons en matière de design sous-marin et d’innover dans d’autres domaines de recherche grâce à des outils avant-gardistes.

Pour déployer leurs boîtiers sous-marins et autres équipements, l’équipe gère des kilomètres de câbles en fibre optique. Afin d’éviter les enchevêtrements, ils utilisaient auparavant des roues de vélo recyclées pour guider la fibre le long du navire. Cependant, l’arrivée de l’imprimante SLA de grande taille leur a permis de concevoir des prototypes plus compacts et plus efficaces pour cette tâche.

Après plusieurs versions testées, ils ont réussi à créer une glissière optimale, imprimée avec de la Résine Clear sur la Form 3L. 

Innovations dans le domaine de la fibre optique

Cette ligne en fibre optique nécessitait aussi un dispositif de terminaison mécanique robuste pour permettre de la tirer sans endommager le cœur de la fibre.

Les câbles en fibre optique, ne pouvant être noués ou manipulés de la même manière que les lignes plus résistantes, ont conduit le laboratoire à concevoir un embout spécifique pour les extrémités des câbles.

Grâce à une pièce d’une précision remarquable, imprimée en 3D par les imprimantes SLA de haute résolution de Formlabs, il est possible de dissocier les tresses externes qui portent la ligne de la partie centrale fragile en fibre optique.

En injectant de l’époxy, la partie tressée adhère solidement à l’embout imprimé en 3D, tandis que la fibre optique est guidée à travers un conduit métallique spécifique, permettant sa connexion à un ordinateur pour la transmission des données.

« Cette solution d’attache est extrêmement résistante, supportant jusqu’à 45 kilos. Sans l’impression 3D, la production de tels dispositifs pourrait s’élever à 3000 ou 4000 euros par pièce avec des méthodes conventionnelles, » conclut-il.